La relation sujet / prédicat
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La notion de sujet a été d’abord définie selon des critères intuitifs : le sujet est dans un premier temps identifié comme étant « l’être ou la chose qui fait ou subit l’action exprimée par le verbe ». Considérant cette définition, le sujet se devait de répondre aux questions : qui est-ce qui ? qu’est-ce que ? Mais cette définition a perdu de sa pertinence de nos jours.
On a ensuite essayé de cerner cette notion par un
réseau de propriétés plutôt
que par une définition figée. Ces
propriétés reposent sur l’équilibre
fragile de la phrase canonique : sujet / verbe /
compléments, dans cet ordre strict, et dans une
phrase déclarative. De là découlent donc les
affirmations suivantes :
- le sujet est vital à l’harmonie
grammaticale de la phrase ;
- le sujet se place généralement en
tête de phrase et avant le verbe ;
- le sujet est souvent de type nominal (nom
propre ou commun, infinitif nominalisé,
pronom…)
- il régit l’accord du verbe
conjugué en personne et en nombre ;
- dans le passage de la voix active à la voix
passive, le sujet devient complément
d’agent.
La notion de prédicat émerge de ces analyses : si le sujet est « ce dont on parle », soit la première partie de la proposition, le prédicat est la suite, « la manière dont on parle du sujet ».
Mais ces caractéristiques ne fonctionnent guère que pour les structures attributives: La mer est claire. Que dire d’une phrase comme : Il a offert une bague à sa fiancée ou encore Il lit un roman d’aventures ? (un roman d’aventures n’a pas grand chose à voir avec « la manière dont on parle de il ».)
La relation sujet / prédicat ne tient pas toujours debout.
On nuance le rôle du sujet en y voyant « le point d’appui » du jugement, « sa source », « le point de départ de la pensée ». Apparaît alors la notion de thème pour décrire le rôle du sujet. On s’éloigne alors d'une terminologie purement syntaxique (la syntaxe coïncide avec l’interprétation logique de la phrase) pour dégager les éléments statiques et dynamiques qui constituent l’énoncé.
Le thème qualifie donc l’objet même d’un énoncé, d’un acte d’énonciation. On appelle propos (ou rhème) le contenu qui nous est transmis sur ce thème.
Dès lors, on va rechercher des informations en posant
différentes questions.
Considérons la phrase Jeanne mange un délicieux
gâteau. On peut s’interroger sur : que fait
Jeanne ? (Jeanne est alors thème et mange un
délicieux gâteau, le propos ; mais on peut
aussi découper la phrase en deux constituants grammaticaux
qui renvoient à l’analyse sujet /
prédicat : Jeanne est groupe sujet, mange un
délicieux gâteau est le prédicat
composé de verbe + COD). Si l’on s’interroge
maintenant sur : que mange Jeanne ? le thème est
alors Jeanne mange, et le prédicat un délicieux
gâteau.
Autant de questions pour élucider une relation grammaticale bien complexe…
On remarque dans la langue parlée que ces différents éléments sont souvent marqués par des intonations particulières : le propos a tendance à être marqué d’un accent pour se distinguer du thème, plutôt neutre. Ce sont là des phénomènes de cadence. Dans la langue écrite, ces phénomènes sont par exemple très sensibles en poésie.
Dans le cas de la langue écrite toujours, ce sont les bouleversements dans l’ordre des mots qui doivent attirer notre attention :
- Son délicieux gâteau, Jeanne le mange ! Les constituants sont ici inversés et détachés (par la virgule), ce qui place en situation de thème l’élément COD dans la phrase canonique.
- Délicieux, ce gâteau ! Le thème est ici absent et on note la transformation en phrase non verbale. Le caractère délicieux du gâteau est accentué, car mis en valeur par le détachement des constituants de la phrase.
- C’est Jeanne qui mange un délicieux gâteau. La mise en valeur du propos se fait ici par une tournure dite de focalisation (présentatif…pronom relatif) ; le thème est alors rejeté à la suite du propos.
- C’est un délicieux gâteau que mange Jeanne. La mise en valeur modifie la hiérarchie des éléments puisque cette fois, la tournure évoquée ci-dessus extrait un délicieux gâteau. Le thème n’est plus le même que précédemment.
Si l’on s’en tient à une appréciation purement syntaxique de la phrase, on peut aussi analyser l’ordre des mots dans une phrase comprenant un sujet et un prédicat. Le sujet peut naturellement être postposé pour des raisons syntaxiques, comme dans les phrases interrogatives (Viendras-tu ce soir ?), dans certaines phrases exclamatives (Est-il charmant !), dans des propositions incises (Il viendra plus tard, répondit Jeanne), après certains adverbes dits de discours (Peut-être préfères-tu l’autre gâteau ?).
Le sujet peut aussi être postposé pour des raisons stylistiques et c’est là qu’il faut prêter attention aux intentions de l’auteur. Par exemple, pour préserver la progression de l’énoncé, on peut choisir de placer en tête de phrase des mots rappelant des éléments déjà évoqués (éléments non informatifs, donc non prédicatifs) : on assure alors la progression thématique du texte, comme c’est le cas dans : Le village était très animé par la fête. D’un côté, des femmes s’affairaient à préparer des confiseries et des gâteaux. De l’autre couraient des enfants excités par les préparatifs.
L’inversion peut relever aussi d’une volonté esthétique et / ou expressive. On décide de mettre en valeur, en tête de phrase, un élément qui rejettera le sujet après le verbe : Vienne la nuit, sonne l’heure (Apollinaire), Puisse-t-il seulement m’aimer un peu !, Soit ABC un triangle isocèle, Sont déclarés reçus à cet examens : X, Y, Z, Telle est ma volonté, Ici repose un grand homme.
Définir le sujet et le prédicat va au-delà de la simple grammaire mais touche à la fois au sens, à l’esthétique et à l’expressivité du texte. On ne peut aborder ces notions sans évoquer la relation thème / propos. Ces notions sont certes relativement complexes, mais doivent vous permettre d’analyser l’utilisation des éléments constitutifs d’un énoncé, leur choix et leur hiérarchisation pour en dégager des effets de sens.
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