« Madame Bovary », Gustave Flaubert : Lecture méthodique 1 - La recherche d'un bonheur idéalisé
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Objectif
Aborder une thématique importante du roman et en
comprendre les enjeux.
En 1857, le roman
Madame Bovary
paraît enfin, après un travail acharné et
douloureux de presque 5 années et un
procès devant la 6e chambre
correctionnelle pour « outrage à la morale
publique et religieuse et aux bonnes mœurs
».
Son auteur, Gustave Flaubert, est finalement acquitté et le procès assure le succès du roman, permettant à Madame Bovary de se hisser au rang de classique de la littérature française.
L’extrait choisi ici est la suite de la scène de la balade à cheval avec Rodolphe, au cours de laquelle Emma devient sa maîtresse.
Cet extrait se situe dans la deuxième partie du roman, au chapitre IX :
« D’abord ce fut comme un étourdissement [...] Elle le savourait sans remords, sans inquiétude, sans trouble. »
Son auteur, Gustave Flaubert, est finalement acquitté et le procès assure le succès du roman, permettant à Madame Bovary de se hisser au rang de classique de la littérature française.
L’extrait choisi ici est la suite de la scène de la balade à cheval avec Rodolphe, au cours de laquelle Emma devient sa maîtresse.
Cet extrait se situe dans la deuxième partie du roman, au chapitre IX :
« D’abord ce fut comme un étourdissement [...] Elle le savourait sans remords, sans inquiétude, sans trouble. »
1. Les relations masculines d’Emma
a. Le monde étriqué de Charles
Charles Bovary, le mari
d'Emma, devient rapidement à ses yeux tout ce
qu’elle déteste, tout ce qu’elle veut
fuir : il est à ses yeux médiocre,
sans ambition, maladroit, sans
séduction.
b. Le monde du rêve : le vicomte
• Le vicomte,
rencontré fugitivement le temps d’une danse
au bal de la
Vaubyessard, est l’un des personnages
principaux de la vie rêvée par
Emma.
Il représente l’idéal amoureux, elle peut l’idéaliser : il ressemble aux personnages de ses lectures et rien n’altère cette image qu'elle a de lui puisqu'elle ne le connaît pas vraiment. À ce titre, grâce à l’imagination d’Emma, le vicomte revêt le caractère du héros romanesque.
• Mais cet épisode est aussi un éveil à la sensualité : ils s’enlacent, leurs corps s’entremêlent même et son regard insistant provoque « une torpeur ».
• Elle est fascinée par son élégance, matérialisée par la boîte à cigares en argent trouvée sur le chemin de retour après le bal qui devient pour elle un objet mythique.
• La veille de sa mort, elle croit le reconnaître dans un tilbury qui a failli l’écraser. Un gentleman en fourrure de zibeline a attiré son attention :
Il représente l’idéal amoureux, elle peut l’idéaliser : il ressemble aux personnages de ses lectures et rien n’altère cette image qu'elle a de lui puisqu'elle ne le connaît pas vraiment. À ce titre, grâce à l’imagination d’Emma, le vicomte revêt le caractère du héros romanesque.
• Mais cet épisode est aussi un éveil à la sensualité : ils s’enlacent, leurs corps s’entremêlent même et son regard insistant provoque « une torpeur ».
• Elle est fascinée par son élégance, matérialisée par la boîte à cigares en argent trouvée sur le chemin de retour après le bal qui devient pour elle un objet mythique.
• La veille de sa mort, elle croit le reconnaître dans un tilbury qui a failli l’écraser. Un gentleman en fourrure de zibeline a attiré son attention :
« Qui était-ce donc ?… Mais c’était lui, le Vicomte ! Elle se détourna : la rue était déserte… Puis elle pensa qu’elle s’était trompée. ». |
Madame Bovary,
Gustave Flaubert, 1857 |
c. Le romantisme : Léon
• À Yonville, Emma éprouve pour
Léon un amour
platonique. Son discours romantique est
propre à faire naître des sentiments chez la
jeune femme.
• Dès que Léon rencontre Madame Bovary, ils s’avouent leur prédilection pour la littérature romantique. Plus tard, leur relation évoluant, Emma se pose la question de l’amour ; elle ne sait pas le reconnaître, c’est un sentiment nouveau pour elle.
Mais « son cœur bondit », lorsqu’elle devine l’amour de Léon :
• Cependant, le romantisme de Léon, sans nuances, plein de clichés, trahit l’ironie de Flaubert, désireux de prendre de la distance avec le lyrisme.
• Dès que Léon rencontre Madame Bovary, ils s’avouent leur prédilection pour la littérature romantique. Plus tard, leur relation évoluant, Emma se pose la question de l’amour ; elle ne sait pas le reconnaître, c’est un sentiment nouveau pour elle.
« L’amour, croyait-elle, devait arriver tout à coup, avec de grands éclats et des fulgurations, – ouragan des cieux qui tombe sur la vie, la bouleverse, arrache les volontés comme des feuilles et emporte à l’abîme le cœur entier. » |
Madame Bovary,
Gustave Flaubert, 1857 |
Mais « son cœur bondit », lorsqu’elle devine l’amour de Léon :
« — Oui, charmant ! charmant !... N’aime-t-il pas ? se demanda-t-elle. Qui donc ?... mais c’est moi ! Toutes les preuves à la fois s’en étalèrent, son cœur bondit. » |
Madame Bovary,
Gustave Flaubert, 1857 |
• Cependant, le romantisme de Léon, sans nuances, plein de clichés, trahit l’ironie de Flaubert, désireux de prendre de la distance avec le lyrisme.
d. Rodolphe : le séducteur stratège et
cynique
• C’est Rodolphe qui, du début
à la fin, mène le jeu. Pour lui, Emma
n’est qu’un plaisir parmi d’autres.
• Ce séducteur expérimenté et stratège charme principalement Emma avec ses paroles.
Il fait trois fois de longs discours : lors des comices, six semaines après les comices et juste avant leur première relation sexuelle.
• Il lui fait entrevoir la possibilité du bonheur :
• Il fait l’éloge de la passion, il en appelle à la fatalité de leur rencontre.
• Il sait séduire Emma en jouant naturellement sur la corde romantique.
• Ce séducteur expérimenté et stratège charme principalement Emma avec ses paroles.
Il fait trois fois de longs discours : lors des comices, six semaines après les comices et juste avant leur première relation sexuelle.
• Il lui fait entrevoir la possibilité du bonheur :
« Il se rencontre un jour, répéta Rodolphe, un jour, tout à coup, et quand on en désespérait. Alors des horizons s’entrouvrent, c’est comme une voix qui crie : « Le voilà ! ». |
Madame Bovary,
Gustave Flaubert, 1857 |
• Il fait l’éloge de la passion, il en appelle à la fatalité de leur rencontre.
« Ne sont-elles pas (les passions) la seule belle chose qu’il y ait sur la terre, la source de l’héroïsme, de l’enthousiasme, de la poésie, de la musique, des arts, de tout enfin ? » |
Madame Bovary,
Gustave Flaubert, 1857 |
• Il sait séduire Emma en jouant naturellement sur la corde romantique.
2. « J’ai un amant ! J’ai un amant !
»
• Mais l’acte qui l’a transformée
le plus radicalement et qui l’a fait
définitivement aimer Rodolphe n’est pas la
parole mais la relation
sexuelle : la manifestation du désir
sexuel de l’autre. Ainsi, juste après cet acte
:
• Elle ne ressent aucun regret, aucun remord, elle ressemble désormais aux héroïnes des livres qu’elle avait lus, aux nombreuses femmes adultères :
• Sa joie est fondée sur le monde des livres qui alimentent sans cesse sa réalité.
« Elle se répétait : "J’ai un amant ! un amant !" se délectant à cette idée comme à celle d’une autre puberté qui lui serait survenue. Elle allait donc posséder enfin ces joies de l’amour, cette fièvre du bonheur dont elle avait désespéré. » |
Madame Bovary, Gustave
Flaubert, 1857 |
• Elle ne ressent aucun regret, aucun remord, elle ressemble désormais aux héroïnes des livres qu’elle avait lus, aux nombreuses femmes adultères :
« Elle se mit à chanter dans sa mémoire avec des voix de sœurs qui la charmaient. Elle devenait elle-même comme une partie véritable de ces imaginations. » |
Madame Bovary, Gustave
Flaubert, 1857 |
• Sa joie est fondée sur le monde des livres qui alimentent sans cesse sa réalité.
« Elle devenait elle-même comme une partie véritable de ces imaginations et réalisait la longue rêverie de sa jeunesse… » |
Madame Bovary, Gustave
Flaubert, 1857 |
a. Le lyrisme d’Emma
Les figures de style témoignent du lyrisme d'Emma
Bovary :
• Le champ lexical du bonheur extrême : « étourdissement », « transfigurait », « fièvre » (2 occurrences), « joies de l’amour », « passion », « extase », « délire », « bouillonnement joyeux »…
Ce bonheur extrême a un effet direct sur son physique, elle est transfigurée.
• Le rythme ternaire donne un rythme de valse à ce passage : « les arbres », « les chemins », « les fossés », « passion », « extase », « délire », « sans remords », « sans inquiétude », « sans trouble »…
• Les accumulations : « si grands », « si noirs », « ni d’une telle profondeur »…
• Le pronom personnel « je » : « J’ai un amant ! j’ai un amant ! »
Le style direct, très rare dans l’ensemble du roman, est d’autant plus remarquable : il souligne l’aspect lyrique de l’extrait.
• Le point de vue interne :
• Les sens en éveil : vue (« voyait », « s’apercevant »), ouïe (« sifflaient »), toucher (« sentait encore l’étreinte »), goût (« se délectait », « savourait »).
• Les correspondances avec la nature : la sensualité de la nature (« le feuillage frémissait », « les joncs sifflaient »), l’ombre et la lumière (« les sommets du sentiment étincelaient », « tout en bas », « dans l'ombre »)…
• Les sentiments opposés : vengeance et triomphe ; merveilleux et souffrance…
• Le champ lexical du bonheur extrême : « étourdissement », « transfigurait », « fièvre » (2 occurrences), « joies de l’amour », « passion », « extase », « délire », « bouillonnement joyeux »…
Ce bonheur extrême a un effet direct sur son physique, elle est transfigurée.
• Le rythme ternaire donne un rythme de valse à ce passage : « les arbres », « les chemins », « les fossés », « passion », « extase », « délire », « sans remords », « sans inquiétude », « sans trouble »…
• Les accumulations : « si grands », « si noirs », « ni d’une telle profondeur »…
• Le pronom personnel « je » : « J’ai un amant ! j’ai un amant ! »
Le style direct, très rare dans l’ensemble du roman, est d’autant plus remarquable : il souligne l’aspect lyrique de l’extrait.
• Le point de vue interne :
« N'avait-elle pas assez souffert ! Mais elle triomphait maintenant, et l'amour, si longtemps contenu, jaillissait tout entier avec des bouillonnements joyeux. Elle le savourait sans remords, sans inquiétude, sans trouble. » |
Madame Bovary,
Gustave Flaubert, 1857 |
• Les sens en éveil : vue (« voyait », « s’apercevant »), ouïe (« sifflaient »), toucher (« sentait encore l’étreinte »), goût (« se délectait », « savourait »).
• Les correspondances avec la nature : la sensualité de la nature (« le feuillage frémissait », « les joncs sifflaient »), l’ombre et la lumière (« les sommets du sentiment étincelaient », « tout en bas », « dans l'ombre »)…
• Les sentiments opposés : vengeance et triomphe ; merveilleux et souffrance…
b. La satire du romantisme
• Le point de vue est interne, il est celui d'Emma ;
cependant, on sent l'ironie du
narrateur omniscient, qui sait que cette
aventure n'est pas la grande passion dont Emma rêve
et qu'elle a idéalisée à travers les
romans sentimentaux.
Quelques indices sont semés au fil du texte : l’adjectif à connotation péjorative « bleuâtre », et surtout les trois expressions « sans remords », « sans inquiétude », « sans trouble » qui annoncent une suite sombre à « cet amour qui jaillissait avec des bouillonnements joyeux ».
• On sent également l’ironie du narrateur dans le caractère exagéré, exacerbé des sentiments et sensations ressentis. Le romantisme donne à la réalité la plus triviale (ici, l’adultère) un aspect merveilleux.
• D’autre part, l’ironie vise le goût du romantisme d’Emma, il dénonce ses lectures :
• Il veut également dénoncer les dangers du rêve : « et réalisait la longue rêverie de sa jeunesse ».
Quelques indices sont semés au fil du texte : l’adjectif à connotation péjorative « bleuâtre », et surtout les trois expressions « sans remords », « sans inquiétude », « sans trouble » qui annoncent une suite sombre à « cet amour qui jaillissait avec des bouillonnements joyeux ».
• On sent également l’ironie du narrateur dans le caractère exagéré, exacerbé des sentiments et sensations ressentis. Le romantisme donne à la réalité la plus triviale (ici, l’adultère) un aspect merveilleux.
• D’autre part, l’ironie vise le goût du romantisme d’Emma, il dénonce ses lectures :
« Ce n’étaient qu’amours, amants, amantes, dames persécutées s’évanouissant dans des pavillons solitaires, postillons qu’on tue à tous les relais, chevaux qu’on crève à toutes les pages, forêts sombres, troubles du cœur, serments, sanglots, larmes et baisers, nacelles au clair de lune, rossignols dans les bosquets, messieurs braves comme des lions, doux comme des agneaux, vertueux comme on ne l’est pas, toujours bien mis, et qui pleurent comme des urnes. » |
Madame Bovary,
Gustave Flaubert, 1857 |
• Il veut également dénoncer les dangers du rêve : « et réalisait la longue rêverie de sa jeunesse ».
L'essentiel
Le roman Madame Bovary est paru en 1857,
après 56 mois de travail acharné. Le
passage étudié dans cette lecture
méthodique se situe au chapitre IX de la
deuxième partie du roman.
Cet extrait raconte le retour d’Emma chez elle ; après la balade à cheval, elle devient la maîtresse de Rodolphe.
Cet extrait offre deux niveaux de lecture : d'un côté figurent le lyrisme et le sentimentalisme d’Emma, de l'autre une satire du lyrisme et du romantisme de la part du narrateur.
Cet extrait raconte le retour d’Emma chez elle ; après la balade à cheval, elle devient la maîtresse de Rodolphe.
Cet extrait offre deux niveaux de lecture : d'un côté figurent le lyrisme et le sentimentalisme d’Emma, de l'autre une satire du lyrisme et du romantisme de la part du narrateur.
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