Philosophes et écrivains végétariens
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- Connaitre la place du végétarisme dans le discours des philosophes et écrivains.
- Connaitre des données sur le végétarisme et la consommation de viande.
- Depuis l’Antiquité grecque et latine, il est question de la place de l’animal dans la société et de leur lien avec les hommes.
- Les monothéismes ont placé l'homme au centre du monde.
- D’autres religions ont une tradition végétarienne encore assez vivante actuellement.
- Notre consommation de viande a un impact direct sur l'environnement.
- Le végétarisme questionne sur le rapport à l'animal et sa place par rapport aux hommes.
On a tendance à considérer le végétarisme comme une « mode » assez récente, depuis les années 1970 et l’émergence de l’antispécisme, or il n’en est rien. Depuis l’Antiquité grecque et latine, il est question de la place de l’animal dans la société et de leur lien avec les hommes.
On cite souvent pour ce sujet Pythagore (571-495 av. J.-C.) et Plutarque (45-120 apr. J.-C.), qui dans son essai S’il est loisible de manger chair, défend la cause animale en rappelant que l’homme ne peut se déclarer supérieur à l’animal et s’autoriser à ôter la vie à un animal sans être considéré comme un criminel :
Plutarque renvoie les hommes à leur cruauté et à leur inconséquence. Même, s’ils appellent « sauvages » les animaux carnivores et les craignent ; ils tuent et mangent eux-mêmes des animaux dociles et doux.
Sans qu’on sache s’ils sont allés jusqu’à pratiquer le végétarisme eux-mêmes, de nombreux écrivains et philosophes, comme Jean de la Fontaine, Leibniz, Voltaire ou Rousseau, ont pris la plume pour défendre les animaux contre la théorie de R. Descartes, philosophe français du XVIIe siècle qui postule que les animaux sont des machines sans sensations, sentiments ni intelligence.
En allant plus loin, au
XIXe siècle, des philosophes et
écrivains commencent à défendre le
végétarisme : en Angleterre, le
poète Shelley écrit un éloge du
végétarisme (1813).
Tolstoï (1828-1910), un des plus grands maitres de
la littérature russe, décide aussi de
devenir végétarien quand il prend
conscience de la violence des abattoirs et de la mise
à mort des animaux. Selon lui, les
chrétiens vivent en contradiction avec
l’un de leur commandement fondamental qui est
« Tu ne tueras point ».
Le même souci de respect de tous les êtres
vivants, de non-violence et surtout de
cohérence, amène Gandhi (1869-1948)
à adopter un régime
végétarien.
Au XXe siècle, le dramaturge G.
B. Shaw devint végétarien à
l’âge de 25 ans, après avoir
assisté à une conférence. Il
déclare à ce sujet :
« Les animaux sont mes amis, je ne mange pas
mes amis ».
M. Yourcenar (1903-1987), grande écrivaine
française, a été
végétarienne. Dans une conférence
intitulée « Qui sait si l'âme
des bêtes va en bas ? » (titre
tiré de L'Écclésiaste
3.21), donnée le 8 avril 1981 à
Lisbonne, elle fait un rapprochement qui peut sembler
audacieux entre les animaux destinés à
l'abattoir et les victimes humaines de violences et de
cruauté :
Enfin, le philosophe P. Singer, qui a marqué l’histoire des idées en publiant La Libération animale, ouvrage fondateur du mouvement pour le droit des animaux et de la pensée antispéciste, est aussi végétarien.
Les monothéismes, qui considèrent que
l’homme était au centre du monde et
dominait la création, influencent encore
largement notre culture, nous faisant considérer
comme « naturel » le fait de
manger des animaux.
Cet humanisme anthropocentrique considère
l’être humain comme ayant une place
à part dans la nature.
Dans le christianisme par exemple, l’animal a
été créé pour le bien de
l’homme, centre et maitre de la
création :
et :
Cependant le végétarisme est beaucoup plus ancien et surtout plus répandu dans d’autres cultures qui ont pensé autrement la responsabilité morale des êtres humains vis-à-vis des animaux. Des grands penseurs occidentaux ont aussi refusé de manger des animaux, ou refusé de les considérer comme des « machines » sans sensibilité, ni intelligence.
À l’inverse de notre culture
héritée d’un
judéo-christianisme « appauvri,
auquel la connaissance et l'amour du reste des
êtres ont été
retirés » (M. Yourcenar),
d’autres religions ont une tradition
végétarienne encore assez vivante
actuellement.
Par exemple, pour les hindous, l’ahimsa (que
l’on peut traduire par non-violence) est un des
fondements de leur religion et exclut toute mise
à mort volontaire et même le fait de
s’approprier les œufs d’une poule.
L’ahimsa exige le respect absolu de tout ce qui
vit :
La Bhagavad-Gîtâ
Ainsi, encore environ 20 à 40 % des Indiens sont végétariens. Il existe aussi sur les mêmes bases (la non-violence) une tradition végétarienne chez les bouddhistes, même si elle est moins reconnue.
Une des autres sources philosophiques du
végétarisme est
l’antispécisme, c'est-à-dire la
volonté d’étendre le principe
d'égalité à toutes les
espèces humaines ou animales. Aucune
espèce n’a le droit d’en dominer une
autre, penser l’inverse est uniquement une forme
d’égoïsme. Les spécistes
pensent qu’on peut tuer des animaux, parce
qu’ils appartiennent à une autre
espèce que la nôtre.
Le culturel joue un rôle très important
dans notre perception des espèces. Ainsi, en
France, il n’y a pas de problème à
manger une vache, alors que dans la plupart des
États indiens, il est formellement interdit de
manger une vache reconnue comme
« sacrée ».
Selon la partie du monde où se trouve le
spéciste, son rapport à la viande change.
En Chine, il est possible de manger les chiens dans certaines situations tandis que dans d’autres cultures, ce fait est impensable, car il est considéré comme un animal de compagnie. Le même effet peut se produire pour le cochon, mangé en France, mais qui peut être un animal de compagnie pour d’autres peuples.
Mélanie Joy développe cette idée dans son ouvrage, Why We Love Dogs, Eat Pigs and Wear Cows – An Introduction to Carnism (2010) :
Malgré les différences de point de vue qu’il peut exister dans le monde, il est important de rappeler que la consommation de viande dans les pays développés est une catastrophe d’un point de vue écologique. L’industrie de la viande est l’une des principales causes de la déforestation dans le monde, du réchauffement climatique…
Sur le site de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, il est indiqué que le secteur de l’élevage contribue à 14,5 % des émissions de CO2. Elles correspondent à 50 % de méthane qui est issu de la fermentation entérique des ruminants, du fumier et du riz (lorsque ce sont des cultures de riz qui sont utilisées pour l’alimentation des animaux) ; 25 % proviennent de la déforestation, de l’extension des terres et de l’utilisation des énergies fossiles ; et 25 % proviennent du protoxyde d’azote qui est lié aux engrais utilisés sur les cultures destinées à l’alimentation des animaux et au lisier/fumier.
L’élevage de masse est un problème pour la planète. D’après Greenpeace, en Amazonie brésilienne, 63 % de la déforestation est destinée à l’élevage. En effet, le soja planté à la place de la flore enlevée sert à nourrir le bétail (sur place et à l’étranger).
À la place de notre culture du « plus », il faudrait nous tourner vers une culture du « mieux ». Greenpeace propose ainsi de réduire notre consommation de viande, sans la supprimer, pour faire un pas vers la planète. Il propose de consommer 16 kg de viande issus d’un élevage de qualité en une année. Cela correspondrait à une consommation de 300 grammes par semaine. Cet effort peut aussi être réalisé sur notre consommation de lait, pour laquelle ils préconisent un peu plus d’un demi litre de lait par semaine et par personne.
L’autre aspect défendu pour une réduction, voire une suppression, de la consommation de viande repose sur la souffrance animale et les conditions d’élevage. Pour le végétarisme, il y a une égale dignité entre les animaux et les hommes qui ont de l’intelligence, de la bienveillance, et qui éprouvent de la douleur. Les animaux sont des êtres sensibles.
Le végétarisme cherche à mettre en lumière l’inutilité de la souffrance animale liée à notre consommation puisque l’homme peut se nourrir uniquement de produits végétaux. Consommer de la viande, pour certains philosophes, est contraire à un idéal de vie frugale et sobre. La pratique de l’élevage industriel dégrade l’animal, et par extension l’homme. Ces dernières années, plusieurs scandales dans des abattoirs ont éclaté pour révéler les conditions de traitement et d'abattage des animaux.
En 2018, l’association militante L124 a diffusé une vidéo d’un abattoir qui découpait les animaux alors qu’ils étaient encore conscients. Suite à cela, l’abattoir a été fermé.
Le dernier point important défendu par le végétarisme est l’impact du non-respect de la vie animale. L’homme, en tuant des animaux, réprime son empathie et sa capacité à compatir à la souffrance. Il peut donc devenir cruel. Pour eux, l’injustice faite aux animaux serait donc une des causes des souffrances de l’humanité, en entravant l’évolution morale de l'humanité. Maltraiter les animaux, c’est risquer de maltraiter les hommes.
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