Fantastique, horreur, science-fiction
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Objectif :
Enoncer l'impact du montage dans les genres du fantastique,
de l'horreur et de la science-fiction. Le point central de
ces mouvances étant celui de la représentation
de l'étrange, du monstrueux, de l'Autre.
Le fantastique réside dans le surgissement de l'étrange dans un
milieu aux fondements réalistes. Cet
étrange peut trouver une explication, elle tarde
à arriver et le doute
subsiste dans l'esprit du spectateur.
Dans l'horreur, l'accent n'est plus vraiment mis sur l'appréhension d'un phénomène surnaturel dans son rapport à un milieu réaliste, mais sur cet événement source d'angoisse. Son caractère surnaturel n'est d'ailleurs plus garanti.
La science-fiction de son côté rétablit le lien entre l'événement étrange et le monde réaliste, elle est une projection de notre monde dans un avenir de tous les possibles (l'avenir des autres mondes, des nouvelles technologies, etc.). Le surnaturel, même s'il est moins surprenant, y occupe donc une place de choix.
L'apparition de l'étrange est donc au coeur des trois genres. Cela étant, de quelle manière les cinéastes font surgir ce monstrueux dans la séquence d'images homogènes qui constitue le film ?
Dans l'horreur, l'accent n'est plus vraiment mis sur l'appréhension d'un phénomène surnaturel dans son rapport à un milieu réaliste, mais sur cet événement source d'angoisse. Son caractère surnaturel n'est d'ailleurs plus garanti.
La science-fiction de son côté rétablit le lien entre l'événement étrange et le monde réaliste, elle est une projection de notre monde dans un avenir de tous les possibles (l'avenir des autres mondes, des nouvelles technologies, etc.). Le surnaturel, même s'il est moins surprenant, y occupe donc une place de choix.
L'apparition de l'étrange est donc au coeur des trois genres. Cela étant, de quelle manière les cinéastes font surgir ce monstrueux dans la séquence d'images homogènes qui constitue le film ?
1. Ne pas montrer
Ne pas montrer le monstre est une
possibilité. Dans ce cas, sa présence
s'affirme dans le hors champ, il peut surgir de nulle
part. Chaque personnage visible dans le cadre en
éprouve donc la menace. Et plus le cadre est
serré sur ce personnage (moins il y a d'espace entre lui et le
hors-champ), plus la menace se fait pressante
et angoissante.
« Alien » (Ridley Scott, 1979) illustre ce cadre angoissant. Les apparitions de la bête sont rares, disséminées sur la longueur du film. Elles sont souvent réduites à des fragments qui n'annoncent pas tant l'apparition du monstre que la disparition du personnage menacé (une tentacule apparaît puis disparaît derrière le personnage qui se fait ainsi assassiner).
La disparition peut aussi frapper un personnage qui se métamorphose :
« La Féline » (Jacques Tourneur, 1942) conte le parcours d'une jeune femme maudite qui se transforme en panthère lorsqu'elle éprouve des sentiments intenses.
L'apparition du monstre est une disparition, la disparition de la jeune femme amène l'apparition du monstre.
La bête n'est pas montrée, son apparition réside exclusivement dans la collure des deux plans. La bête est bien suggérée par un grand nombre de signes éparpillés tout au long du film : des grognements, des ombres, une panthère dans un zoo, des dessins, etc.).
« Alien » (Ridley Scott, 1979) illustre ce cadre angoissant. Les apparitions de la bête sont rares, disséminées sur la longueur du film. Elles sont souvent réduites à des fragments qui n'annoncent pas tant l'apparition du monstre que la disparition du personnage menacé (une tentacule apparaît puis disparaît derrière le personnage qui se fait ainsi assassiner).
La disparition peut aussi frapper un personnage qui se métamorphose :
« La Féline » (Jacques Tourneur, 1942) conte le parcours d'une jeune femme maudite qui se transforme en panthère lorsqu'elle éprouve des sentiments intenses.
Un soir en pleine rue, elle se met à suivre une
collègue de son mari par jalousie.
Le montage
alterné fonctionne ainsi : des
plans sur les jambes de la poursuivie et sur celles de
la poursuivante. On entend à chaque fois le
son des pas du personnage filmé
et celui, plus faible, des pas de l'autre
personnage hors-champ.
Puis, soudainement, sur les images de la poursuivie, on remarque que le bruit des pas de la poursuivante s'est arrêté. Dans le montage alterné, les plans consacrés à la poursuivante ne montrent plus qu'un plan vide de personnage : elle a disparu. Des cris se font entendre. La féline s'est transformée.
Puis, soudainement, sur les images de la poursuivie, on remarque que le bruit des pas de la poursuivante s'est arrêté. Dans le montage alterné, les plans consacrés à la poursuivante ne montrent plus qu'un plan vide de personnage : elle a disparu. Des cris se font entendre. La féline s'est transformée.
L'apparition du monstre est une disparition, la disparition de la jeune femme amène l'apparition du monstre.
La dernière séquence du film
présente la féline face au psychiatre. Le
docteur s'approche d'elle et l'embrasse. Le baiser
réunit les deux protagonistes dans un seul
plan. Puis les corps se séparent,
leur séparation se matérialise par un
champ-contrechamp (chacun
habite son propre plan, l'autre en est exclu).
L'homme esquisse un mouvement en arrière (plan 1). La femme s'approche de lui, passe devant la caméra et sort presque entièrement du cadre (plan 2). La caméra retourne sur l'homme, effrayé, qui recule franchement, et sort une arme dissimulée dans sa canne ; on entend alors les cris de la bête, etc. (plan 3).
L'homme esquisse un mouvement en arrière (plan 1). La femme s'approche de lui, passe devant la caméra et sort presque entièrement du cadre (plan 2). La caméra retourne sur l'homme, effrayé, qui recule franchement, et sort une arme dissimulée dans sa canne ; on entend alors les cris de la bête, etc. (plan 3).
La bête n'est pas montrée, son apparition réside exclusivement dans la collure des deux plans. La bête est bien suggérée par un grand nombre de signes éparpillés tout au long du film : des grognements, des ombres, une panthère dans un zoo, des dessins, etc.).
2. Le fragmentaire
Le montage peut aussi favoriser l'apparition du monstre
de façon fragmentaire en offrant au
spectateur des morceaux de son anatomie.
Rien ne garantit pourtant l'unité de l'ensemble :
Le montage dissémine une série de signes pour construire la figure monstrueuse. Le monstre, c'est l'hétérogène. Ces éléments peuvent se coudre les uns aux autres et donner une forme absolument horrible. C'est le cas pour « Jeepers creepers » (Victor Salva, 2001) : le monstre est une espèce de grand montage d'images angoissantes tirées d'œuvres cinématographiques et littéraires différentes (« La mouche » de Cronenberg, 1986 ; « Duel » de Spielberg, 1971 ; « Le fléau » de Stephen King adapté ensuite pour la télévision, etc.).
Rien ne garantit pourtant l'unité de l'ensemble :
Dans « Suspiria » (Dario
Argento, 1977), les
manifestations du monstre sont tout à fait
hétérogènes. Des yeux
dans un plan, deux lumières dans le noir,
sans visage, puis un bras qui traverse une vitre. On peut
penser que l'unité du monstre va se constituer
petit à petit. Il exercera aussi sa violence par
l'intermédiaire d'un chien qui tue son
maître, ou s'incarnera dans une pluie de vers.
La scène finale le présente en une sorcière qui se manifeste d'un plan à l'autre sous toutes sortes de formes (visuelles et sonores, on entend en effet la musique qui accompagnait ses crimes, les aboiements du chien, etc.)
La scène finale le présente en une sorcière qui se manifeste d'un plan à l'autre sous toutes sortes de formes (visuelles et sonores, on entend en effet la musique qui accompagnait ses crimes, les aboiements du chien, etc.)
Le montage dissémine une série de signes pour construire la figure monstrueuse. Le monstre, c'est l'hétérogène. Ces éléments peuvent se coudre les uns aux autres et donner une forme absolument horrible. C'est le cas pour « Jeepers creepers » (Victor Salva, 2001) : le monstre est une espèce de grand montage d'images angoissantes tirées d'œuvres cinématographiques et littéraires différentes (« La mouche » de Cronenberg, 1986 ; « Duel » de Spielberg, 1971 ; « Le fléau » de Stephen King adapté ensuite pour la télévision, etc.).
3. Montrer
D'autres monstres peuvent apparaître à de
nombreuses reprises, dans leur intégrité
physique et être tout à fait visibles.
Leatherface dans « Massacre à
la tronçonneuse » (Tobe
Hooper, 1974) reste une référence.
Le montage ne ménage pas d'angoisse particulière le concernant, il s'impose dans le plan et se lance à la poursuite de ses victimes : le bruit de sa tronçonneuse confirme sa présence. S'il bénéficie d'une forme de dissimulation, elle est principalement due au masque de cuir qu'il porte toujours, jusqu'à faire partie de lui.
Il y a néanmoins un montage fragmentaire dans le film, mais il frappe d'autres corps, d'autres lieux (les plans des cadavres en décomposition, des œuvres d'art monstrueuses, des personnages menacés par la famille - voir notamment les très gros plans de l'œil de Sally).
Comme si le découpage (celui des corps, par la tronçonneuse ou par le cadre), frappait par un renversement ceux qui ne seraient pas à leur place (les étrangers, les touristes) et non pas les monstres qui habitent aussi bien le plan que leur région.
Lorsque la visibilité du monstrueux est importante et ses manifestations spectaculaires, on peut se rapprocher du gore. Le grotesque et l'écœurement se substituent alors à l'angoisse et à la peur.
Le montage ne ménage pas d'angoisse particulière le concernant, il s'impose dans le plan et se lance à la poursuite de ses victimes : le bruit de sa tronçonneuse confirme sa présence. S'il bénéficie d'une forme de dissimulation, elle est principalement due au masque de cuir qu'il porte toujours, jusqu'à faire partie de lui.
Il y a néanmoins un montage fragmentaire dans le film, mais il frappe d'autres corps, d'autres lieux (les plans des cadavres en décomposition, des œuvres d'art monstrueuses, des personnages menacés par la famille - voir notamment les très gros plans de l'œil de Sally).
Comme si le découpage (celui des corps, par la tronçonneuse ou par le cadre), frappait par un renversement ceux qui ne seraient pas à leur place (les étrangers, les touristes) et non pas les monstres qui habitent aussi bien le plan que leur région.
Lorsque la visibilité du monstrueux est importante et ses manifestations spectaculaires, on peut se rapprocher du gore. Le grotesque et l'écœurement se substituent alors à l'angoisse et à la peur.
L'essentiel
Dans le fantastique, l'horreur et la science fiction, le
montage doit souvent prendre en charge les apparitions de
l'étrange comme du monstrueux.
Deux possibilités se présentent :
• intégrer des images d'un monstre tout à fait visible, représenté dans son intégrité, comme un personnage (Leatherface).
• utiliser la suggestion : limiter ses apparitions et faire du hors-champ son espace.
Deux possibilités se présentent :
• intégrer des images d'un monstre tout à fait visible, représenté dans son intégrité, comme un personnage (Leatherface).
• utiliser la suggestion : limiter ses apparitions et faire du hors-champ son espace.
Entre ces deux choix opposés existent des stratégies qui consistent à faire du monstre lui-même le montage d'une série de fragments (des plans fragmentaires d'organes) dont les apparitions sont espacées dans le temps (contiguës ou disséminées). Dans ce cas, on montre et on suggère, en même temps.
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