1. Le retour à la Guerre froide
a. L’Europe au cœur du retour à la Guerre
froide
La conférence d’Helsinki, en 1975, avait
marqué l’apogée de la Détente et
semblait devoir inaugurer une nouvelle ère de
stabilité internationale au sein du continent
européen. Mais, dans la réalité, les
ambitions soviétiques en Europe ne sont en rien moindres.
Dans un contexte qui voit les pays industrialisés
occidentaux se débattre avec ce qui semble être une
crise économique et sociale majeure, le modèle
communiste peut apparaître plus que jamais comme un
substitut au modèle libéral apparemment à
bout de souffle. Par ailleurs, la mise en place des accords SALT,
en 1972, limite la prolifération des armements
nucléaires de type stratégique,
c’est-à-dire intercontinentaux. Cependant, elle ne
prévoit rien pour les armements nucléaires de
portée intermédiaire. Dès lors, la course
aux armements entre les deux superpuissances se concentre sur ce
type d’armements, dont le terrain de prédilection
est l’Europe.
b. L’offensive soviétique
En 1977, l’Union soviétique annonce le
déploiement en Europe centrale de missiles SS20, de
portée intermédiaire, c’est-à-dire
incapables d’atteindre le territoire américain. A
l’évidence, ces armes ne peuvent être
utilisées que dans le cadre d’un conflit
intra-européen. Pour les pays européens qui
vivaient depuis plusieurs années dans la perspective
d’un apaisement des relations entre les deux blocs et dont
les opinions publiques pouvaient penser que le continent
européen n’était plus ni théâtre
ni enjeu de la Guerre froide, la réalité des
relations internationales se réveille brusquement.
C’est aussi, pour l’Union soviétique, aller
à l’encontre du principe de non-dissémination
des armes nucléaires qui avait été
tacitement mis en place après la crise des fusées
de Cuba.
2. Entre Guerre des étoiles et désarmement
nucléaire
a. Un nouveau containment
L’offensive soviétique correspond aussi à un
changement d’appréciation de la part des Etats-Unis,
notamment avec l’arrivée au pouvoir de Ronald
Reagan, candidat du parti républicain élu
président en 1980. La première réplique
américaine intervient en fait en 1979, lorsque les
responsables américains annoncent le futur
déploiement en Europe occidentale de missiles Cruise et
Pershing II. Mais ce déploiement, annoncent les
responsables américains, ne peut intervenir
avant 1983 et ne pourrait se faire que dans le cadre de
l’OTAN. Ainsi, pour les Européens occidentaux, il
faut à nouveau s’en remettre à la tutelle
américaine pour leur défense contre la menace
communiste. Ces pays européens sont par ailleurs
agités d’importants mouvements pacifistes soutenus
en sous-main par les organisations communistes.
Ainsi que le rappelle alors le président
Mitterrand : « les pacifistes sont à
l’Ouest, mais les missiles sont à
l’Est ».
Une nouvelle escalade dans la tension a lieu en 1980,
lorsque les Etats-Unis annoncent qu’ils entament la
fabrication de la bombe à neutrons. En mai 1983,
Reagan lance l’IDS (Initiative de Défense
Stratégique), plus connue sous le nom de
« Guerre des étoiles ». Elle
consiste en l’édification d’un vaste
réseau de satellites formant un véritable
bouclier spatial destiné à intercepter tout
missile soviétique dans le court laps de temps où
il traverse les hautes couches de l’atmosphère. Le
programme est mal perçu par les Européens qui
considèrent que les Etats-Unis s’apprêtent
à leur retirer le « parapluie
nucléaire ». En effet, l’IDS ne
pourrait rien contre le lancement de missiles SS20 depuis les
pays de l’Est contre l’Europe occidentale car ces
missiles ne traversent pas les hautes couches de
l’atmosphère. Ces craintes sont à peine
dissipées par le déploiement des missiles
Pershing et Cruise qui intervient, comme prévu,
en 1983.
b. Une volonté de désarmement nucléaire
Mais le système soviétique est à bout de
souffle. Les décès successifs des principaux
dirigeants, Brejnev, Andropov et Tchernenko laissent finalement
percevoir les dysfonctionnements du système. Une nouvelle
génération de dirigeants arrive au pouvoir, qui
prend conscience que l’Union soviétique ne peut
suivre la nouvelle course aux armements que les Etats-Unis
mettent en place avec l’annonce de l’IDS. Le coup de
bluff américain (l’IDS était impossible
à réaliser au début des
années 1980 mais l’Union soviétique, en
retard dans de nombreux domaines technologiques était dans
l’incapacité d’évaluer correctement la
faisabilité du projet) ouvre alors finalement la voie
à un désarmement nucléaire.
Le renforcement de la construction européenne est une
autre conséquence de la crise. En effet, après
avoir pris conscience du fait que leur sécurité
dépendait des Etats-Unis et que ceux-ci
s’orientaient vers la mise en place de mesures
défensives essentiellement destinées à
sanctuariser le territoire américain en cas
d’affrontement, de nombreux responsables européens
estiment qu’il est temps d’orienter la construction
européenne vers une intégration plus large, voire
émancipée de la tutelle américaine.
L’essentiel
La mise en place d’un nouvel expansionnisme
soviétique fait resurgir les vieux antagonismes entre
les deux blocs. A nouveau, l’Europe, qui avait
été au centre du processus de détente, se
trouve au cœur de la dynamique d’affrontement entre
les blocs, mais d’une façon plus dramatique cette
fois, avec la crise des euromissiles.